Hémérocalle, échelle amor
Chaque année, fin juillet, l'ouverture de mon atelier en plein air commence ainsi : dès que Xavier part voler, je cueille les hémérocalles fanées de la veille ou de l'avant-veille. C'est devenu comme un rituel auquel je me plie avec délice, ravie de pérenniser la vie de ce lys d'un jour qui s'ouvre au matin et meurt le soir même.
Orangé au jardin, il m'offre souvent une jolie teinte violine inattendue quand j'en pilonne le cadavre. La floraison du massif dure une semaine. Chaque année a son geste, son format. Cette fois, j'avais envie de terminer un grand rouleau de papier et optais pour un triptyque. J'y écrasais mes hémérocalles en balayant mes feuilles de papier d'un geste ample pendant quelques jours.
Une dizaine de fleurs y passa et j'en gardais quatre pas trop abîmées pour un petit format (ci-dessus). Je laissais poser une bonne semaine sans trop savoir où tout cela me mènerait.
Je partais pour une petite espacade piémontaise, terminais une toile, puis recevais quelques amis. Les abeilles n'étaient toujours pas là, les insectes rares, et les oiseaux, peu nombreux, économisaient leur énergie, tapis dans les arbres. Les merles raflaient les quelques fruits qui avaient survécu au yoyo climatique du printemps. On se partageait le jardin et je les gênais peu. Ils me frôlaient parfois quand je dessinais. De temps à autres, le cri des aigles me faisait lever le nez.
Quand je suis revenue à mes hémérocalles, un coup de vent venait de fermer la voile de Simon beaucoup trop près du sol. Ce parapentiste exceptionnel va nous manquer longtemps et pas seulement dans les nuages… Je n'avais plus tellement envie de couleurs et je suis allée chercher une vieille bouteille d'encre de Chine épaissie par des années de gel et de dégel pour dire au revoir à Simon.
🤗
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