Censeurs, je vous hais !



Le 3 mai dernier, jour de la liberté de la presse, le dirigeant de la chaîne de télévision tunisienne Nessma, était condamné pour avoir diffusé Persepolis. 
Depuis hier soir, le couvre-feu est tombé sur Tunis. Parce qu'une exposition a offusqué quelque esprit resserré, quelques bruyants empêcheurs de la pensée errante. 
Silence radio sur le printemps arabe.
Le contexte est ce qu'il est dans cette partie du monde : soumis à des fondamentalismes fort éloignés de l'aspiration des fidèles musulmans, mais suffisamment prosélytes pour couvrir toutes les autres voix.

Les prosélytes se défient toujours de l'art.
Parce que dans la main de l'artiste, ce sont des mots et des images en liberté qui aiment à emprunter les chemins de traverse. Parce que la main de l'artiste touche l'homme là où il pleure, là où il rit, là où il vibre, là où il vit. Parce que dans la main de l'artiste, c'est l'homme réellement : une créature instable, en devenir, un être riche de mots en cascade, d'esprit en escalier… un démiurge que le doute fait rebondir.

Que n'avez-vous compris que rien ne pouvait empêcher la pensée de divaguer, que dans la main de l'artiste, le besoin de liberté ne se dit pas seulement sur le fond, mais également dans la forme ? 
Cette absolue nécessité explose en volutes entrelacées dans les pierres des mosquées !
Votre cœur est trop sec. Vous n'avez pas senti comme l'arabesque centrifuge et exaltée, mille fois répétée, reproduit aussi bien qu'un Van Gogh l'ivresse d'un champ de blé.

L'artiste a dans la main la quintessence du désir : celui qui fait que l'homme, toujours, tend le cou et dresse la tête pour voir plus loin - derrière l'horizon - et qu'il invente, par plaisir ou par besoin, ce que ses yeux ignorent.
Pour faire des mondes émouvants, démiurges.
Pour créer Dieu. 
C'est cela qui vous dérange.

Plus que tout, je crains l'obscurantisme. Etouffer la culture c'est asphyxier l'humain. Censeurs, je vous hais !

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