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Affichage des articles du mars, 2016

Réenchanter le monde

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Rien ne meurt jamais tout à fait, pas même Dieu.  Je regrette mes années de jeunesse, quand on croyait encore que Dieu était bien mort. Mais il est trop tard pour la nostalgie. (D’ailleurs, il est toujours trop tard pour la nostalgie). Tout de même, je revois les bancs de la fac, nos rêves insensés  et cette mise en garde pourtant, que Max Weber assénait depuis  un siècle déjà, quand il alertait sur la solitude de l’homme moderne,  son enfermement mécanique et le «désenchantement du monde». Nous le lisions dans les livres, nous n’étions pas peu fiers de remarquer la pertinence de ces écrits dans notre société qui déjà, changeait… Mais le cancer, on le sait, cela n’arrive qu’aux autres…  Aujourd’hui,  il me semble que c’est notre hébétude qui a ressuscité Dieu. Dans  les vides que nous avons laissés à force de renoncement.  Nous n’avons pas assez interrogé la modernité, pas suffisamment questionné notre désenchantement. Même si les faits sont peu comparables, sans

Peace and love, sans blague !

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Ce matin, je me suis réveillée au son des petits oiseaux qui gazouillaient sur mon portable et recueillais, ravie, les messages sur ma page Facebook (merci à tous) : j'entre dans ma cinquantième année et je savourais ces petits bonheurs avec toute l'insouciance qui caractérise ma génération. (…) Puis Bruxelles a reçu. Un double attentat. Coordonné. One more. (…) Hier, j'ai tourné la dernière page des Choses de Pérec, secouée d'insouciance. Il me semble que, de toutes façons, cette page-là a tourné. Et pourtant, sans blague : "Peace and love" !

Bruxelles

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Bang, bang et rebang ! et bang encore !  Là puis là : aéroport puis métro. Bang puis bang !  Cette fois encore, j'ai voulu croire que j'avais mal entendu, que j'avais manqué le début, que l'on revenait sur un événement passé… J'ai voulu croire mais n'ai pas pu: martelée, détaillée, l'info tombe et retombe et j'encaisse l'évidence. La stupeur fait patienter la douleur, la suspend un moment. De tout cœur avec les Bruxellois.

Printemps des poètes - 4. Les Matinaux (René Char)

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" Les poèmes sont des bouts d'existence incorruptibles que nous lançons à la gueule répugnante de la mort, mais assez haut pour que, ricochant sur elle, ils tombent dans le monde nominateur de l'unité." René Char, Le Rempart de brindilles , in La Parole en archipe l, Je ne pouvais pas terminer ce printemps des poètes autrement qu'avec cette citation. Je ne connais pas de meilleure définition de la poésie et c'est pour cette raison que je l'aime : elle me rassure infiniment, me fournit les recettes du bonheur… et me laisse mauvaise cuisinière ! Je me sens intimidée pour vous parler de René Char. Pas seulement à cause de l'héroïsme discret de ce résistant hors pair, maquisard et provençal, mais parce qu'il me semble chaque jour que sa poésie, son humanisme inébranlable et son regard émerveillé nous manquent infiniment. Comme j'aimerais parfois l'entendre éclairer ce monde de ses paroles lumineuses ! Mais voilà qu'il me tance, com

Printemps des poètes -3 "écrire le cri" (Tanella Boni)

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D'après une photo de Frédéric Lecloux "écrire le cri la vie une chanson promise à la mer (…)" Je n'avais pas prévu cela. Pas une seconde. Ce week-end, j'ai réfléchi au texte qui devait célébrer l'immense poète que je pensais recevoir aujourd'hui dans ces colonnes. Ce matin encore, les yeux encore à demi fermés sur mon sommeil, j'en tournais les mots dans tous les sens, tant et si bien que mon papier était prêt avant même que ne sonne le glas de la nuit, avant que ne retentisse, sur un jingle , le réveil-bande FM. "rappeldestitres:c'estautourdelaCôted'ivoired'êtrevictimedesattentats(…)l'afriquedel'ouestconvoitéeparl'islamiseradical(…)" Ouch ! J'ai pensé que le maquisard qui hypnotisait mes nuits depuis quelques jours, n'aurait pas aimé qu'on fasse comme si de rien n'était ; qu'il aurait eu des mots sublimes, lui, pour ceux de Côte d'Ivoire explosés hier soir dans trois hôtel

Printemps des poètes 2 - "Tandis que les crachats rouges de la mitraille" (Rimbaud)

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Ce poète-là a le cœur en bordure, l'insolence bravache et la peine abyssale.  C'est une étoile filante, un éclair, un coup à l'âme.  Un maître du suspens poétique qui te promène, léger, dans les "frais cressons bleus" et te plombe au final comme on se prend une balle. Un amoureux total, un passionné absolu… messager des émois qui vous retournent l'âme, là, vous tout seul, avec votre peine et votre désir, votre jubilation et vos renoncements…  Mais un homme que l'homme intrigue, que l'homme fait jouir et désespère ; un chercheur d'éternité. "Et merde aux saisons !", écrivait-il… Entre chaos de guerre et soif d'absolu, c'est un mélancolique pur jus du XIXe siècle ; et quel nectar !  Dans tout ce fatras, il avait ce génie : celui de savoir nous émerveiller du beau comme du laid, parce qu'en amour, en fait, c'est égal. On aime à dire qu'il aurait mal fini, vendeur d'armes revenu de tout ?  Je ne sais pas. Ma

Printemps des poètes - 1 - "Soient frites ces langues envieuses !"

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C'est le printemps des poètes et l'aubaine est trop belle : j'ai dans mon escarcelle quelques portraits choisis de bardes comme on les aime : gouailleurs de tous les temps et festoyeurs itou.  Je m'en vais de ce pas les dévoiler pour vous…  Une cruelle tentation car il faudra attendre le printemps avancé : ils seront disponibles en tirage limité et en exclusivité à la librairie La Tête ailleurs dès l'ouverture, bientôt. En attendant, musique maestro ! Voici Maître François qui règle quelques comptes. On a beau dire, une ballade en vers et pieds tenus pour envoyer péter, c'est quand même bien plus classe qu'un pâle "casse toi pauvre con"… Ballade (in Le Testament) François Villon En realgar *, en arsenic rocher, En orpiment*, en salpêtre et chaux vive, En plomb bouillant pour mieux les émorcher*, En suif et poix détrempés de lessive, Faite d'étrons et de pissat de juive, en lavaille de jambe à méseau*, En raclure de pied et

Pour la galerie

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Voilà maintenant plus de deux mois que j'ai changé d'atelier. Celui-ci présente de nombreux avantages mais un inconvénient majeur : y organiser des expositions est un peu compliqué. Or il se trouve que l'art a ceci de particulier que quand ce n'est pas pour la galerie, ça n'a quand même pas tout à fait le même sens. Bref, il faut que j'expose mon travail parce que, justement, c'est du travail. Alors je voulais vous présenter une petite série, celle de mes dessins sur Ipad®, petits one shots tirés en 5 exemplaires et qui racontent plein de trucs, parfois graves, mais avec souvent pas mal de légèreté. J'y ai adjoint quelques toiles, quelques œuvres sur papier et une installation parce que tout ça m'a paru fichtrement cohérent ! Alors si vous avez ou pensez à un lieu, si ça vous touche et que vous avez envie de le partager, le catalogue est là : Merci. PS : Amis facebouquiens, vous n'y trouverez pas le dessin du jour —  m